Le 18
Il n'est pas de Roue Libre sans cassette ni de cassette sans pignon.
Celui qui est à l'honneur ici n'est pas un habitué des unes. C'est moins le pignon jaguar, magnifique, séducteur, grand blond que la doublure, le jouet, la chèvre, le fugitif, la valise voire l'emmerdeur ou le c.., chers à Francis Weber, dont il est question.
En effet, celui qui était aux premières loges des cassettes 5, 6 ou 7 vitesses en côtoyant le 19, grande couronne de l'époque, n'est plus guère parmi nous. Entré dans l'anonymat par sa présence en milieu de cassette 8 ou 9, il a fini par disparaître des grosses entités actuelles.
On pourrait penser que, comme un lapin sur un bateau, il serait accusé de tous les maux ou toutes les pannes (morales, physiques, mécaniques) à la seule évocation de son nom. Serait-ce un signe de superstition ? Porterait-il malheur à son utilisateur ? Je n'y crois pas. Les cyclistes, les fabricants sont bien trop rationnels pour céder à ces croyances.
Je me risque à penser qu'il est peut-être associal puisqu'il n'apparaît pratiquement que sur les roues libres mono-pignon. Il peut faire son fier quand la concurrence s'associe pour équiper les rouleurs au long cours, les escaladeurs alpins ou les champions exigeants. Il préfère fréquenter les vélos des enfants qui délaissent "la 18" (Gulli) au profit d'un bol d'air ou d'un numéro de BMX. On peut le rencontrer également à l'arrière des bicyclettes des "belles" moins soucieuses de la performance que d'une coquetterie harmonieuse.
Et qu'en est-il des fixies? Ces machines rétro-futuristes réapparues en France, emboîtant la mode des coursiers newyorkais. Je n'en dirai pas plus car le sujet n'a rien à faire dans un ... Roue Libre.
Vous avez compris, je suis un militant du 18. Pas seulement parce qu'il laisse un vide entre le 17 et le 19 aussi désagréable qu'une mâchoire amputée de son utile prémolaire offrant un espace se comblant de peaux de saucisson ou autres viandes à pot au feu. Il a aussi toute sa place sur les machines de nous, cyclotouristes, fréquemment rythmés à une cadence de 60 tours/mn.
Voici quelques exemples de vitesses atteintes dans ces conditions:
Petits rappels (facultatifs):
V (km/h)= D(m) × 60(tr/mn) × 60(mn) ÷ 1000 où
V= Vitesse en km/h
D= Développement en m
60 t/mn= Fréquence de pédalage
Développement D(m)= Nb dents plateau ÷ Nb dents pignon × C (Circonférence de la roue en m)
C= 2,133m pour une roue de 700 mm et un pneu de 23 mm
D= 30X18= 3,55m V= 13 km/h
D= 34X18= 4,03m V= 14,5 km/h
D= 39X18= 4,62m V= 16,6 km/h
D= 42X18= 4,98m V= 18 km/h
D= 50X18= 5,93m V= 21,3 km/h
D= 52X18= 6,16m V= 22,2 km/h
Fin des rappels.
Tout le monde sera d'accord avec moi: la meilleure solution pour augmenter sa vitesse est de pédaler plus vite.
Tout le monde comprend également que notre 18 est celui qui manque à notre peloton, pour différentes raisons, plus ou moins graves, dont il faut prendre des nouvelles.
Je profite donc de cette modeste et nécessaire tribune pour faire un petit clin d'oeil à nos absents blessés, malades, condamnés à lire ce Roue Libre pour tuer un peu de temps.
Et pour finir, il n'est pas indispensable d'avoir un 11 ou un 12 pour composer le 112 ni d'un 18 pour composer le ...18 en cas de besoin!
Pascal Levavasseur